mercredi 9 septembre 2015

Records, Vues et Earl Grey

Réjouis-toi, toi lecteur-trice lambda, callé-e dans ta chaise de bureau, qui ne soutient plus ton dos depuis bien longtemps. Réjouis-toi enfant de Jérusalem et de Babylone! Oui, réjouis toi, fais péter la cithare et le hautbois. Fais-moi tonner les trompettess que ça dérange les phoques de la mer de Ross. Fais tonitruer la fanfare, pas parce que Betty fait péter le record de la monarchie. Fais cracher les amplis, j’suis de retour ! 



Tu te rends compte, nous sommes le 9 septembre, et même si le 9 septembre est plus avancé chez toi que chez moi, ça fait un mois que je suis ici. Un mois depuis Zaventem, son sandwich à l’américain, le Fokker 50 qui faisait des loopings (Exagé-quoi ?), et la chambre décorée aux couleurs de Liverpool. Et bon sang, il s’en est passé des choses depuis.  Quand je t’avais laissé pour aller faire mes courses et bien en fait, je t’ai un peu raconté n’importe quoi, parce que je me souviens bien avoir eu très faim ce soir là, en skypant un-e ami-e (ma maman ?) comme le gros rebelle que je suis dans la partie silencieuse de la bibliothèque (pour ma défense, avant que tu n’appelles la bibli-police, il était passé l’heure assez tardive de 18h30 et la bibliothèque était totalement vide.)  Les deux semaines qui ont suivi pourraient facilement concourir dans la catégorie semaine intense de l’année[1] Pas mal d’heures de cours, de conférence, et de débats (même le weekend). Les débutants ne peuvent pas s’imaginer toutes les façons différentes qu’il y a de compter les ours polaires avec un ciré jaune sur bateau au milieu de l’Arctique.  Mais, comme tu t’en doutes, j’ai survécu. D’ailleurs, je suis même de plus en plus convaincu d’aimer ce master, et mieux d’avoir bien choisi. (Et, c’est quand même un p’tit plus, je te l’avoue.)  Pendant ces deux semaines intensives, j’ai vécu au Jørgensen local. Une auberge de jeunesse que je t’avais déjà décrite, et qui, bien que n’étant pas le nec-plus-ultra de l’habitat estudiantin, m’aura laissé de bons souvenirs.
Car oui, un beau dimanche de fin-août, après avoir passé mon premier samedi de libre à regarder Liverpool se faire détruire en Premier League[2], j’ai déménagé dans mon chez moi presque permanent que j’occuperai jusque décembre[3]. C’est un petit studio que je partage avec une étudiant Erasmus (ça me rappelle ma jeunesse) lettone. Imagine un peu ces espèces de grandes chambres doubles pour étudiants américains, qu’on peut voir dans ces films hollywoodiens un peu clichés. Tu rajoutes un coin cuisine et une petite salle de bain, et tu as le tout. Et comme je tiens pas trop de Balzac quand il s’agit de rédiger des jolies descriptions, voici quelques photos pour te faire une idée.



Ma coloc’ est assez sympa. Elle reste ici pour un semestre, et elle fait des études en Culture. Un peu le tour des sciences humaines. On a pas énormément de points communs, mais on peut parler de tout. De la mafia du fromage, en passant par Doctor Who, les bouquins anglais, ou encore un mini-débat pour savoir si on « ice » des cupcakes ou si on les « frost. »[4] (On est étudiant avec du temps à perdre ou on n’l’est nié !) 


La semaine dernière, je me suis fais un cadeau d’anniversaire anticipé. Je t’avais dit que j’avais l’intention d’acheter un vélo, et bien c’est chose faite. Bon, ok, c’est pas le vélo de Bradley Wiggins ni celui de Pauline Ferrand-Prévot, mais il a du guidon, et il tient pas mal la route avec ses gros pneus. Pour la petite histoire, je l’ai acheté dans un magasin qui ressemblait aux ateliers de vélos d’antan, avec un gros racer en vitrine, et le vendeur dont les mains étaient pleines de graisse de vélo. En voyant, le racer qui trônait-là,  je me suis senti un peu comme Harry quand il voit le Nimbus 2000 pour la première dans la vitrine du magasin de balais sur le Chemin de Traverse. Ai-je donc acheté ce vélo de course qui brillait de mille feux, te demandes-tu ? Malheureusement non, le racer était (largement) hors de prix – j’ai pas d’argent bien placé dans un coffre à Gringotts, malheureusement. – mais je suis ressorti avec le GT Avalanche – ce nom colle assez bien avec là où je vis.- et depuis, je visite les alentours d’Akureyri quand j’ai un peu de temps. 


                                     

Une vingtaine de minutes après être sorti du magasin, je change de plateau, je donne une petite impulsion dans un tournant, et ni une ni deux, champion du monde toutes catégories que je suis, je me retrouve à dire bonjour au macadam d’une route normalement assez fréquentée. Par chance, à part des égratignures, et la sensation d’être dans une bulle, j’avais pas grand chose. Sur le chemin du retour, j’ai même rencontré un couple d’ami-e-s sur leur vélos lui-elle aussi, et il-elle m’ont raccompagné jusque chez moi. Que veux-tu, je commence à être connu par ici. Le lendemain, j'ai été à la clinique gratuite (Yes, America, a free clinic!) en pensant que j'avais une légère commotion, et le médécin m'a rassuré en disant que tout allait bien. (Bon, à part la santé mentale qui ne s'arrange pas, mais bon on peut pas tout avoir non plus, hein!) 

Hier et avant-hier, j’ai pédalé jusque l’autre côté du fjord, de là je suis monté (et dieu, c’était pas une mince affaire) et j’ai su avoir la vue que tu vois ici en photo. J’aime encore bien, c’est pas trop moche comme endroit. En fait, c’est bien simple, que tu regardes à gauche, à droite, devant ou derrière toi, tu as des montagnes. Des vertes, des blanches, des marrons, des brunes. Des montagnes partout. Et, ça coupe le souffle façon vieille école bien comme il faut. 






A part ça, la vie va ! Je me suis rendu compte hier que je n’avais fait aucune démarche pour un permis de séjour ou un numéro de sécurité sociale islandais (kennitala, le p’tit nom qu’on lui donne ici), et j’ai donc contacté le secrétariat international de l’université. Je sais pas si les dieux des secrétaires étaient sous speed, ou sous coke, mais j’ai eu une réponse, en moins de quinze minutes et mon problème était réglé. S’il voulait se faire un peu d’argent facile, le gars pourrait vendre sa méthode aux secrétariats universitaires du monde entier. J’suis sûr que ça marcherait.


Récemment, j’ai aussi fait la découverte du siècle ( et non, je ne te parle pas de cette réduction sur le kilo de gouda au Bonus du coin !), il y a bien un (l’unique) magasin qui a compris comment  faire du profit et qui ouvre de 10h à minuit, tous les jours. Oui, oui TOUS LES JOURS ! Il répond sous le doux nom d’Hagkaup. Et bon, je vais nié te raconter des bobards, comparativement, il est pas mal cher. Mais on sait jamais, si un dimanche matin je me réveillais et que je découvrais que je n’ai plus de Earl Grey[5] (le seul thé valable dans ce pays à la teneur en café hautement toxique), et bien, j’y ferais un petit tour.



Allez, enough about me, comme on dit dans mon pays presque-natal ! J’ai du linge à aller plier. (ou autre chose, si jamais je me fais distraire en route.)







[1] The Guardian a récemment publié le RC’s Tough Weeks Ranking. Un classement de mes semaines les plus intenses pour l’année 2015 (selon un sondage Metrolink) Et elles se sont pas mal classées. On les félicite chaleureusement.
(http://www.theguardian.com/Romain_Chuffart/Tough_Week_Ranking_15/UNAK )

[2] Casse-dédi à West Ham ! J’suis pas peu fier sur le coup, boys !

[3] Parce que je sais que tu meurs d’envie de m’écrire/ m’envoyer du chocolat/des billets pour la coupe du monde de rugby pour mon anniversaire, voici mon adresse : Romain « The only Belgian in Town » Chuffart, Guesthouse Akurinn, 27 Brekkugata, 600 Akureyri, Islande (ou « Iceland » si tu te sens un peu foufou à vouloir jouer l’anglo-saxon.)

[4] D’ailleurs, si tu es anglais-e/anglophone/anglisant-e n’hésite pas à venir ajouter ta pépite de chocolat à notre glaçage, une ligne téléphonique est ouverte. Tu peux même me contacter via facebook, skype, hiboux, je prends tout !

[5] Situation assez improbable, je me rends bien compte après coup ! 

jeudi 13 août 2015

Les premiers jours!



Bon alors voila, aujourd’hui je viens de finir ma première journée de cours. Normalement, dans un monde où la fatigue n’est qu’un rêve à dormir debout, je devrais étudier, enfin lire. Syllabus après syllabus, pages après pages, mot après ... (Tu comprends, la suite, non ?) je me retrouve dans la bibliothèque d’Akureyri, j’allume mon pc et puis boom, j’ai internet. Sans rien faire, juste comme ça. (Les dieux d’Eduroam ont encore frappé. [notez, que même sans eduroam, j’aurais pu me connecter. J’ai reçu mes identifiants UNAK – comprendre Université d'Akureyri- aujourd’hui. « Si si, rpz la seucla » comme disent les jeunes chouettes et branchés des quartiers en vogue.]- Si ce n’est pas un appel, que dis-je, une perche tendue vers la piscine de la procrastination, je ne sais pas ce que c’est.  Et puis, me suis-je dit « Romain ! [Regardez moi ce beau vocatif !] Tu pourrais très bien passer ton temps à écrire un blog. » « Un blog ? » me répondis-je sur un ton mêlant la surprise et la tentation.  « Mais en voila un idée qui prend du temps ! »  Et voila, comment tout a commencé ! Vraiment ?

Ce dimanche 9 août, quand je mangeais ce sandwich dans ce Panos dans la zone internationale, après la sécurité, à l’aéroport de Zanventem, je ne me rendis pas compte tout de suite que cela allait être mon dernier repas avant longtemps. J’imaginais seulement qu’il allait être mon dernier sandwich à l’américain avant longtemps (apparemment c’est belge, cette bonne bêtise-là.) Je l’engloutis donc sans retenue. Cinq minutes montre en main, il était 13h15, l’embarquement était censé être à 13h20. Ni une ni deux, je filais vers la porte A49 pour m’apercevoir qu’en fait, les passagers du vol précédent descendaient seulement de notre avion, enfin du leur. Si vous avez déjà attendu longtemps pour embarquer, vous comprendrez aisément mon impatience.[1] Quand nous avons enfin pu embarquer, après une dizaine de minutes, j’eu la chance de découvrir mon premier boeing 757 de l’intérieur. Oufti, que c’est grand ces machins. Avec une première classe, rebaptisée « Saga Class » pour l’occasion, dont les fauteuils prennent deux sièges « normaux. » Marchant le long d’une allée centrale gigantesque aussi, je trouvai enfin mon siège, 22C, avec un écran tactile pour regarder à peu prés ce que tu veux. (Bon, d’accord, toi là-bas, le lecteur qui est déjà allé aux États-Unis, ça te parait ridicule, je sais. Mais, pour moi, petit européen que je suis, ça en jetait pas mal.)

Bien sûr, cela va presque de soi maintenant, nous eûmes du retard pour décoller. Et un bébé pleurait, il y a toujours un bébé qui pleure dans les longs voyages ainsi. L’américain à côté de moi, me dit qu’il voudrait passer pour aller chercher des écouteurs dans son sac, je me dis que c’était pas une mauvaise idée de prendre les miens, on se remet à nos places, on se met tous les deux un petit film[2] sur nos écrans respectifs. Et boom, la paix. Nous arrivâmes à Reykjavik sans encombre, avec un petit ving minutes de retard, ce qui gâcha mes plans de trouver un petit truc à manger. Je courus jusque la porte d’embarquement F-chiffre, pour me rendre compte encore une fois, que l’embarquement ne se faisait pas ! Nous étions donc une dizaine à attendre sagement, d’embarquer. A un moment, v’la-ti-pas[3] que le monsieur au guichet nous fait signe d’avancer. Nous présentâmes donc nos billets, et nous montâmes dans un bus. Oui, oui, un bus.

Une fois les portes du bus closes, il démarra et nous conduisit de l’autre côté de l’aéroport, où un petit avion (un Fokker 50) nous attendait sagement. Là aussi, nous décollâmes avec un peu de retard. Le plus drôle, selon moi, c’était l’hôtesse qui se présente, qui présente l’appareil et puis, qui par flegme ou par dépit, nous dit dans le micro : « voila, je ne vous ferai pas la démonstration de la ceinture de sécurité, ni des consignes pour quitter l’appareil. » C’est toujours rassurant. J’avais une allemande à côté de moi, on a échangé deux-trois phrases. Nous avions tellement l’air stressé qu’on n’aurait pas su dire plus, même avec toute la bonne volonté du monde. Arrivés, sain et sauf, à Akureyri, nous sortîmes de l’avion, sur un termac nous accueillant chaleureusement, avec de la pluie, du vent, et ce doux air de l’aventure qui pointe son nez. En rentrant dans l’aéroport, mes compagnons de bonne fortune et moi-même avons pu nous rendre compte que nous étions face au plus petit tapis roulant au monde[4]. Ma valise arriva quelques minutes après et je pus me rendre de façon presque immédiate, en marchant 5km sous la pluie et le vent glacial, chez Greita et sa fille, des Islandaises qui louent une chambre, à petit prix (islandais). Toutes les deux fans de Liverpool FC. Car oui, la maison était décorée à l’éffigie du club scousien. Nous avions donc déjà un sujet de conversation tout tracé. 


                                                                                   *

Les premiers jours m’ont surtout servi à découvrir la ville, et aussi à comprendre, par exemple, que TOUS les magasins n’ouvrent qu’à 10h et ferment TOUS vers 18h30 – 19h. Vous vous souvenez du sandwich de Zaventem ? « Oui, oui, l’américain » entends-je scander la foule. Et bien, j’ai dû attendre 10h du matin, le lendemain, pour aller acheter quelque chose à manger. J’ai aussi découvert que les bus sont gratuits ici, mais bon, j’aimerais quand même bien me renseigner sur les prix des vélos. Ça pourrait être pas mal, surtout vu toutes les côtes des la région. Il y a aussi des trucs bien amusants, comme par exemple, le lidl/aldi/fakta local s’appelle "Bonus" et a pour emblème un cochon-tirelire rose fluo qui me fait beaucoup rire. En général, l’islandais ( la langue) m’amuse aussi. C’est beaucoup moins gravier dans la gorge que le danois, beaucoup plus chantant. C’est sympa. Si j’ai le temps, et c’est un gros « si » je prendrais des cours. Apparemment, c’est encore une langue plutôt facile. ;-) 
                                         

Mercredi (hier) vers 14h, j’ai déménagé. En effet, l’université a réservé, pour nous pauvres étudiants sans logements pour les cours intensifs, des lits dans le motel le plus populaire du coin.  Un motel qui me rappelle le Jørgensen à Copenhague.[5] Avec ces lits deux-étages, ces chambres de six personnes, ces douches à la cave et le petit déjeuner inclus dans le prix. En parlant d’inclusion, l’eau est gratuite quasiment dans les restaurants ici. (j’en ai pas fait beaucoup, mais pour le moment, ça a l’air de se maintenir comme théorie.) Nous sommes trois dans ma chambre. Enfin, nous étions trois, jusque hier vers 23h30, quand trois touristes américains ont débarqué avec fracas. En effet, ici, on loue le lit, et pas la chambre, ce qui fait que tu peux te retrouver dans une chambre de six, tout seul, ou avec cinq personnes que tu ne connais pas. J’aime encore bien le concept, sauf, bien sûr, quand ils te donnent des envies de meurtres à 23h30, alors que tu viens à peine de t’endormir.

 
Aujourd’hui, j’ai eu mes premiers cours, rencontré mes premiers camarades de classe (mis à part ceux que j’avais déjà vus au motel.) et atténué les doutes/craintes que j’avais. J’avais peur d’être un peu à la masse (oui, il y avait des lectures à faire avant les cours, et j’ai survolé la plus grosse partie, tellement il y avait à lire.) Je m’attendais à avoir une armada d’étudiants prêts, connaissant déjà tout sur tout. Et en fait, je vois que nous avons tous brièvement lu les syllabi. Par contre, je suis un des plus jeunes – si pas le plus jeune – Tous les autres, doivent avoir plus que 25 ans. Pour les deux semaines (10 jours, ok ...) qui viennent nous sommes tous réunis à Akureyri. Que ça soit les étudiants des îles Féroés, du Groenland ou de Reykjavik. Tous dans le nord de l’Islande, avec nous, pauvres étudiants en Polar Law. La première grosse bonne surprise a quand même été que la prof principale a un énorme accent écossais – elle est écossaisse [ça reste dans une logique cohérente] – super méga joli de la mignonittude suprême. La deuxième est qu’au moins la moitié du groupe parle danois, ce qui m’a déjà laissé l’occasion de ne pas rouiller. (Même si je dois t’avouer, toi, lecteur avide de révélations, je préfère parler anglais.)

Bon allez, je file ! Sinon les supermarchés vont fermer avant que je ne sois redescendu dans le centre ville !


[1] Si vous aussi vous avez déjà dû attendre, trépignant d’impatience, devant une porte d’embarquement, avec un sac à dos relativement lourd, appelez le : 012 345 678 900. Un service d’aide est en train d’être mis en place.

[2] Pour lui, c’était un truc avec des booms booms explosion, et pour ma part j’ai regardé « Kingsman : The Secret Service » : un film d’espion totalement barge avec Colin Firth <3 (donc, oui, un bon film !)

[3] V’la-ti-pas © est une expression déposée. Pour toute réclamation concernant l’utilisation de cette expression veuillez-vous adresser directement à Marie Boreux au numéro suivant : 04xx xx xx xx
[4] Guinness Book, 1996

[5]Casse-dédi aux canetons!