Réjouis-toi, toi lecteur-trice lambda, callé-e dans ta chaise de bureau,
qui ne soutient plus ton dos depuis bien longtemps. Réjouis-toi enfant de Jérusalem et de Babylone! Oui, réjouis toi, fais péter
la cithare et le hautbois. Fais-moi tonner les trompettess que ça dérange les phoques de la
mer de Ross. Fais tonitruer la fanfare, pas parce que Betty fait péter le
record de la monarchie. Fais cracher les amplis, j’suis de retour !
Tu te rends compte, nous sommes le 9 septembre, et même si le 9
septembre est plus avancé chez toi que chez moi, ça fait un mois que je suis
ici. Un mois depuis Zaventem, son sandwich à l’américain, le Fokker 50 qui
faisait des loopings (Exagé-quoi ?), et la chambre décorée aux couleurs de
Liverpool. Et bon sang, il s’en est passé des choses depuis. Quand je t’avais laissé pour aller faire mes
courses et bien en fait, je t’ai un peu raconté n’importe quoi, parce que je me
souviens bien avoir eu très faim ce soir là, en skypant un-e ami-e (ma maman ?)
comme le gros rebelle que je suis dans la partie silencieuse de la bibliothèque
(pour ma défense, avant que tu n’appelles la bibli-police, il était passé l’heure
assez tardive de 18h30 et la bibliothèque était totalement vide.) Les deux semaines qui ont suivi pourraient
facilement concourir dans la catégorie semaine intense de l’année[1] Pas mal d’heures de cours,
de conférence, et de débats (même le weekend). Les débutants ne peuvent pas s’imaginer toutes les façons différentes qu’il y a de compter les ours polaires avec
un ciré jaune sur bateau au milieu de l’Arctique. Mais, comme tu t’en doutes, j’ai survécu. D’ailleurs,
je suis même de plus en plus convaincu d’aimer ce master, et mieux d’avoir bien
choisi. (Et, c’est quand même un p’tit plus, je te l’avoue.) Pendant ces deux semaines intensives, j’ai
vécu au Jørgensen local. Une auberge de jeunesse que je t’avais déjà décrite,
et qui, bien que n’étant pas le nec-plus-ultra de l’habitat estudiantin, m’aura
laissé de bons souvenirs.
Car oui, un beau dimanche de fin-août, après avoir passé mon premier
samedi de libre à regarder Liverpool se faire détruire en Premier League[2], j’ai déménagé dans mon chez
moi presque permanent que j’occuperai jusque décembre[3]. C’est un petit studio que
je partage avec une étudiant Erasmus (ça me rappelle ma jeunesse) lettone. Imagine
un peu ces espèces de grandes chambres doubles pour étudiants américains, qu’on
peut voir dans ces films hollywoodiens un peu clichés. Tu rajoutes un coin
cuisine et une petite salle de bain, et tu as le tout. Et comme je tiens pas
trop de Balzac quand il s’agit de rédiger des jolies descriptions, voici
quelques photos pour te faire une idée.
Ma coloc’ est assez sympa. Elle reste ici pour un semestre, et elle fait
des études en Culture. Un peu le tour des sciences humaines. On a pas
énormément de points communs, mais on peut parler de tout. De la mafia du
fromage, en passant par Doctor Who, les bouquins anglais, ou encore un mini-débat
pour savoir si on « ice » des cupcakes ou si on les « frost. »[4] (On est étudiant avec du
temps à perdre ou on n’l’est nié !)
La semaine dernière, je me suis fais un cadeau d’anniversaire anticipé. Je t’avais
dit que j’avais l’intention d’acheter un vélo, et bien c’est chose faite. Bon,
ok, c’est pas le vélo de Bradley Wiggins ni celui de Pauline Ferrand-Prévot,
mais il a du guidon, et il tient pas mal la route avec ses gros pneus. Pour la
petite histoire, je l’ai acheté dans un magasin qui ressemblait aux ateliers de
vélos d’antan, avec un gros racer en vitrine, et le vendeur dont les mains
étaient pleines de graisse de vélo. En voyant, le racer qui trônait-là, je me suis senti un peu comme Harry quand il voit
le Nimbus 2000 pour la première dans la vitrine du magasin de balais sur le
Chemin de Traverse. Ai-je donc acheté ce vélo de course qui brillait de mille
feux, te demandes-tu ? Malheureusement non, le racer était (largement)
hors de prix – j’ai pas d’argent bien placé dans un coffre à Gringotts, malheureusement. – mais
je suis ressorti avec le GT Avalanche – ce nom colle assez bien avec là où je
vis.- et depuis, je visite les alentours d’Akureyri quand j’ai un peu de temps.
Une vingtaine de minutes après être sorti du magasin, je change de plateau, je
donne une petite impulsion dans un tournant, et ni une ni deux, champion du
monde toutes catégories que je suis, je me retrouve à dire bonjour au macadam d’une
route normalement assez fréquentée. Par chance, à part des égratignures, et la sensation d’être dans une bulle, j’avais pas grand chose. Sur le chemin du
retour, j’ai même rencontré un couple d’ami-e-s sur leur vélos lui-elle aussi,
et il-elle m’ont raccompagné jusque chez moi. Que veux-tu, je commence à être
connu par ici. Le lendemain, j'ai été à la clinique gratuite (Yes, America, a free clinic!) en pensant que j'avais une légère commotion, et le médécin m'a rassuré en disant que tout allait bien. (Bon, à part la santé mentale qui ne s'arrange pas, mais bon on peut pas tout avoir non plus, hein!)
Hier et avant-hier, j’ai pédalé jusque l’autre côté du fjord, de là je
suis monté (et dieu, c’était pas une mince affaire) et j’ai su avoir la vue que
tu vois ici en photo. J’aime encore bien, c’est pas trop moche comme endroit.
En fait, c’est bien simple, que tu regardes à gauche, à droite, devant ou
derrière toi, tu as des montagnes. Des vertes, des blanches, des marrons, des
brunes. Des montagnes partout. Et, ça coupe le souffle façon vieille école bien
comme il faut.
A part ça, la vie va ! Je me suis rendu compte hier que je n’avais fait
aucune démarche pour un permis de séjour ou un numéro de sécurité sociale
islandais (kennitala, le p’tit nom qu’on lui donne ici), et j’ai donc contacté
le secrétariat international de l’université. Je sais pas si les dieux des
secrétaires étaient sous speed, ou sous coke, mais j’ai eu une réponse, en moins
de quinze minutes et mon problème était réglé. S’il voulait se faire un peu d’argent
facile, le gars pourrait vendre sa méthode aux secrétariats universitaires du
monde entier. J’suis sûr que ça marcherait.
Récemment, j’ai aussi fait la découverte du siècle ( et non, je ne te
parle pas de cette réduction sur le kilo de gouda au Bonus du coin !), il
y a bien un (l’unique) magasin qui a compris comment faire du profit et qui ouvre de 10h à minuit,
tous les jours. Oui, oui TOUS LES JOURS ! Il répond sous le doux nom d’Hagkaup.
Et bon, je vais nié te raconter des bobards, comparativement, il est pas mal
cher. Mais on sait jamais, si un dimanche matin je me réveillais et que je
découvrais que je n’ai plus de Earl Grey[5] (le seul thé valable dans
ce pays à la teneur en café hautement toxique), et bien, j’y ferais un petit
tour.
Allez, enough about me, comme on dit dans mon pays presque-natal ! J’ai du linge à
aller plier. (ou autre chose, si jamais je me fais distraire en route.)
[1] The Guardian a
récemment publié le RC’s Tough Weeks Ranking. Un classement de mes semaines les
plus intenses pour l’année 2015 (selon un sondage Metrolink) Et elles se sont
pas mal classées. On les félicite chaleureusement.
(http://www.theguardian.com/Romain_Chuffart/Tough_Week_Ranking_15/UNAK )
(http://www.theguardian.com/Romain_Chuffart/Tough_Week_Ranking_15/UNAK )
[3] Parce que je sais que
tu meurs d’envie de m’écrire/ m’envoyer du chocolat/des billets pour la coupe
du monde de rugby pour mon anniversaire, voici mon adresse : Romain « The
only Belgian in Town » Chuffart, Guesthouse Akurinn, 27 Brekkugata, 600
Akureyri, Islande (ou « Iceland » si tu te sens un peu foufou à
vouloir jouer l’anglo-saxon.)
[4] D’ailleurs, si tu es
anglais-e/anglophone/anglisant-e n’hésite pas à venir ajouter ta pépite de
chocolat à notre glaçage, une ligne téléphonique est ouverte. Tu peux même me
contacter via facebook, skype, hiboux, je prends tout !